Méditer quand on est éprouvé par la vie

Texte de la méditation biblique du culte des éprouvés du 12 novembre au temple de Roubaix. Pas à pas, méditer le psaume 77.

Bienvenue à toi qui cherches Dieu à travers les Écritures bibliques.
Je te propose de trouver un endroit au calme et de méditer pas à pas ce psaume.

De t’arrêter pour mieux pouvoir avancer.

 

Prière
Viens à notre aide, Saint Esprit de Dieu, pour que chacun, chacune d’entre nous comprenne quel chemin tu veux ouvrir devant ses pas. Donne à nos esprits persévérance, pour qu’étape après étape, nous nous laissions guider un peu plus vers ta lumière.

 

Lecture biblique :
Psaume 77
1 Du chef de chœur. D’après Yedoutoun. D’Asaph. Psaume.
2 A pleine voix je crie vers Dieu ; à pleine voix, vers Dieu, et il prête l’oreille.
3 Au jour de ma détresse, je cherche le Seigneur ; la nuit, ma main se tend sans se lasser ; je refuse d’être consolé. 4 Je me souviens de Dieu et je gémis ; je réfléchis, et mon esprit défaille.
Pause.
5 Tu tiens mes paupières en éveil ; je suis troublé, je ne parle pas.
6 Je réfléchis aux jours de jadis, aux années d’autrefois.
7 Je me souviens, par mon chant, pendant la nuit ; mon cœur médite, mon esprit s’interroge.
8 Le Seigneur rejettera-t-il pour toujours ? N’accordera-t-il pas de nouveau sa faveur ?
9 Sa fidélité est-elle à jamais épuisée ? Ce qu’il dit est-il anéanti de génération en génération ?
10 Dieu a-t-il oublié de faire grâce ? A-t-il, dans sa colère, fermé sa compassion ?
Pause.
11 Je dis : Ce qui fait ma souffrance, c’est que la main droite du Très-Haut n’est plus la même…
12 Je rappellerai les actions du SEIGNEUR ; je me souviendrai des actes étonnants que tu as accomplis au temps jadis.
13 Je redirai toute ton action ; je méditerai tes hauts faits.
14 O Dieu, ton chemin n’est que sainteté ; quel dieu est grand comme Dieu ?
15 C’est toi, le Dieu qui fait des choses étonnantes ; tu as fait connaître ta puissance parmi les peuples.
16 Par ton bras tu as assuré la rédemption de ton peuple, les fils de Jacob et de Joseph.
Pause.
17 Les eaux t’ont vu, ô Dieu ! Les eaux t’ont vu, elles ont bouillonné ; les abîmes se sont agités.
18 Les nuages ont versé des torrents d’eau, le ciel d’orage a fait retentir sa voix ; tes flèches ont volé de toutes parts.
19 Au bruit de ton tonnerre, dans le tourbillon,
les éclairs ont illuminé le monde ; la terre s’est agitée, elle a tremblé.
20 Ton chemin était dans la mer, ton sentier dans les grandes eaux, et tes traces n’ont pas été connues.
21 Tu as conduit ton peuple comme un troupeau, par l’intermédiaire de Moïse et d’Aaron.

 

Etape 1
Relecture : Psaume 77, 1-4

Méditation
Yedoutoun, Asaph, on ne vous connaît pas beaucoup…
Souvent, on vous oublie quand on lit ou chante des psaumes, on saute le 1er verset… On se dit que cela n’apporte pas grand chose au sens.
Et pourtant en cherchant un peu, votre silhouette se dégage… Vous étiez des chantres – c’est-à-dire des chanteurs de musique religieuse – mais aussi des musiciens renommés à la cour du roi David.
Le deuxième livre des Chroniques te qualifie, toi, Yedoutoun, de « voyant » du roi.

C’est que tu étais déjà héritier de la méditation d’autres générations avant toi.
Méditer le passé te donnait de voir loin devant. Et de regarder la réalité de la vie et du monde sans la fuir.

« Du chef de choeur. D’après Yedoutoun. D’Asaph. »

Ce tout premier verset témoigne de l’importance de la transmission de génération en génération. Il dit l’importance de la recherche de Dieu avec d’autres aussi « en choeur ». Il dit d’emblée l’importance ne pas rester seul face au mal et au malheur.
Méditation partagée, donc. Et cela a continué.
Ensuite tant de générations qui ont laissé leur histoire résonner avec ces mots.
Même aux pires heures de détresse personnelle, même dans les pires heures de détresse collective.

Alors Asaph et Yedoutoun, emmenez-nous nous aussi par votre chant, qui mène de l’horreur à la paix, de la souffrance à la louange car sans les mots que vous nous avez transmis, sans les mots des Écritures juives et chrétiennes, nous n’en saurions pas le chemin.
Nous resterions englués dans notre malheur, anéantis par la violence de la mort qui nous enlève ceux que nous aimons le plus, accablés par le désastre des guerres, submergés par le chaos qui cherche à engloutir nos vies et le monde, aux prises avec l’absurde.

Asaph et Yedoutoun, nous commençons le chemin avec vous. Nous vous écoutons chanter d’abord notre droit de crier vers Dieu notre incompréhension, notre détresse, notre sentiment d’absurde et d’abandon.
Mais vous nous dites aussi que Dieu écoute le malheureux qui crie vers lui à pleine voix.
Il est attentif au cri de celui qui est tellement malheureux qu’il refuse d’être consolé, c’est-à-dire qui refuse les consolations faciles de ceux qui disent que ce n’est pas grave, qu’on n’y peut rien, qu’il faut passer à autre chose, faire son deuil, tourner la page.

Asaph et Yedoutoun, votre chant nous dit de ne pas enfouir la douleur du malheur, de la violence et de l’injustice car elle sera un poison dans notre coeur.
Dieu est là pour la recueillir. On peut la crier vers lui, son coeur est large pour l’accueillir et la porter.

 

Etape 2
Relecture : Psaume 77, 5 – 7

Méditation
Asaph et Yedoutoun, votre voix nous parvient à travers les siècles et les manuscrits interprètent différemment votre chant : les uns disent que c’est Dieu qui tient les paupières de l’éprouvé en éveil et lisent, comme notre Nouvelle Bible Segond :« TU tiens mes paupières en éveil » et d’autres pensent que c’est l’éprouvé lui-même qui refuse de dormir : « JE tiens mes paupières en éveil ». En hébreu la différence est minime : seules les voyelles finales disent la 1ère ou la 2è personne et le texte ancien n’était pas vocalisé…
Et si cette apparente contradiction, nous permettait finalement d’avancer un peu plus loin ?
Si c’est bien l’éprouvé qui refuse les consolations faciles, si c’est lui qui ressasse son malheur et cherche à comprendre en ne comptant pas son temps, si c’est lui qui cherche Dieu comme un besoin de sens devenu vital, alors peut-être est-ce aussi Dieu qui empêche ses paupières de se refermer.
De se refermer sur ce que nous comprenons soudain de manière si vive quand nous sommes touchés par le malheur : seul l’amour compte.

 

Etape 3
Reecture : Psaume 77, 8-10

Méditation
Vous vous faites l’écho, Asaph et Yedoutoun, des questions innombrables qui assaillent l’éprouvé.
Ce sont les questions de celui à qui on a transmis une éducation religieuse, à qui l’on a dit que Dieu sauve son peuple, que Dieu est attentif au sort de l’affligé. Et qui a l’impression que ce n’est pas le cas pour lui, pour elle.
Ce sont les questions de celui qui est vraiment éprouvé et qui a conscience que l’humanité est complice de son malheur en étant injuste et violente. Qui craint alors que Dieu ne l’aime plus.
Ce sont les questions de celui qui est vraiment éprouvé qui ne peut pas hausser les épaules et passer à autre chose. Mais qui accepte l’inconfort de la béance qu’ouvrent les questions. Qui y consacre du temps, au fil des jours et des années s’il le faut.

Apprenez-nous Asaph et Yedoutoun la valeur du temps, l’importance de chercher Dieu avec tout son coeur, toute son intelligence, toute sa force.

 

Etape 4
Relecture : Psaume 77, 11-16
Méditation
Merci Asaph et Yedoutoun, parce que vous nous permettez d’être vrais.
L’éprouvé à le droit de dire :« Ce qui fait ma souffrance c’est que la main droite du Très-Haut n’est plus la même. » Il a le droit de dire la vérité de ce qu’il éprouve, il a le droit d’être contradictoire : d’un côté, il a l’impression que Dieu est impuissant ou ne fait rien pour lui et de l’autre il choisit tout de même de lui parler.
Il choisit tout de même de méditer les Écritures pour comprendre.
Merci Asaph et Yedoutoun, parce que vous nous chantez que notre chemin de salut, de sortie du chaos intérieur, passe par le respect de notre propre conscience en même temps que par la décision de méditer les Ecritures.

Avec vous Asaph et Yedoutoun, nous pouvons regarder alors l’histoire chaotique de l’humanité et ce dont témoignent les Écritures juives : le peuple juif n’est pas saint, mais Dieu, lui, est saint.
Nous mêmes, nous ne sommes pas saints mais si Dieu est saint, cela suffit parce que nous avons dès lors une direction.
Malgré le mal qui nous atteint ; malgré le mal dont on est complice par action ou simplement parce qu’on ne fait rien.
Dieu est fidèle de génération en génération.
Grâce à vous, Asaph et Yedoutoun, l’éprouvé sait qu’il y a deux repères pour avancer : ne pas tricher avec soi-même, mais ne pas se décourager non plus.
Deux repères et une direction : celle de la lumière, celle du Dieu saint, pour avancer.

 

Etape 5
Relecture : Psaume 77, 17-21
Méditation
Comment dire le chemin de libération qui s’ouvre devant les pas de celui qui cherche Dieu ?
Vous le dites, Asaph et Yedoutoun, en poètes : par la poésie des éléments déchaînés que seul comprend celui qui a été tellement secoué dans la vie.
C’est comme l’impression que le malheur a tout fait chavirer mais que Dieu ordonne le chaos lorsque nous relevons la tête de notre propre malheur et que nous regardons vers lui.
Prise de conscience qui vient en un temps différent pour chacun dans son histoire avec Dieu.
Prise de conscience du Dieu qui ordonne le chaos, mais pas seulement de manière intellectuelle. C’est une terre ferme qui s’ouvre comme devant le peuple sortant d’Egypte sur cette peinture de Chagall (voir en haut de cette page web).

On voit le peuple tout désordonné auquel un ange tend les Ecritures qui sont le moyen pour ordonner le chaos intérieur.
Il y a Moïse à gauche qui indique la direction et l’ange, comme une colonne de lumière qui est immense en avant d’eux.
Chagall sait peindre. Il connaît les lois de la perspective. Et ici pourtant, on a l’impression que le chemin vers l’ailleurs, la terre promise est plutôt un chemin vers le haut, vers Dieu. Un chemin qui permet de traverser la mer au milieu de l’obscurité du monde.
Le peuple prend confiance en Dieu et entreprend la traversée.
Il quitte les arrangements qu’il s’était fait avec son malheur. Il prend le risque de se laisser arracher au malheur et au connu.
Il comprend que Dieu ne le protège pas magiquement comme dans une bulle mais en ouvrant avec lui un chemin.

Vous nous transmettez votre foi Asaph et Yedoutoun.
Cette confiance dans la bonté et la fidélité de Dieu de génération en génération.
Et cette conviction que l’action de Dieu ne se passe pas des humains.
Que l’action de Dieu qui nous sauve collectivement et individuellement passe par le coeur et les mains de ceux qui se laissent inspirer par Dieu.
Qui sont laissés eux-même sauver par Dieu.
Comme Moïse le meurtrier mal doué pour pour le langage.
Si mal parti dans la vie.
Et pourtant acceptant de confier sa vie à Dieu qui dit avoir besoin de lui pour que d’autres reprennent espoir.
Pour que d’autres sortent de la résignation, de la dépression individuelle ou collective qui fait dire « À quoi bon… »

Alors, Asaph et Yedoutoun, merci de nous rappeler que le chemin qui nous mène vers la vie retrouvée, vers la paix intérieure, passe par l’amour.
C’est celui qui nous rend solidaires les uns des autres.
Amen.

Pasteure Sandrine Maurot, extrait du culte des éprouvés du 12 novembre 2023 au temple de Roubaix

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